SORORITE
Je fais partie des privilégiées.
C’est pire ailleurs.
Ailleurs, les femmes ne peuvent pas circuler librement.
Ailleurs, les femmes sont systématiquement excisées.
Ailleurs, les femmes ne se marient pas par amour, elles sont vendues.
Ailleurs, pour les femmes, c’est le voile ou la mort.
Ailleurs, les bébés filles sont assassinés à la naissance.
Ailleurs, les petites filles sont prostituées pour les hommes d’ici.
Ailleurs, les femmes sont kidnappées pour être prostituées ici.
Ailleurs, les jeunes femmes subissent de la chirurgie esthétique pour ressembler à Barbie.
Ailleurs, le proxénétisme est légal.
Ailleurs, l’avortement est interdit.
Ailleurs, les femmes sont lapidées.
Ailleurs, les femmes n’ont pas de contraception.
Ailleurs, les femmes girafes restent tranquilles pour qu’on ne leur enlève pas leurs colliers.
Ailleurs, les femmes accouchent systématiquement dans la douleur.
Ailleurs, les filles sont bonnes à marier à partir de 9 ans.
Ailleurs, les femmes n’ont pas le droit de travailler.
Ailleurs, Ailleurs, Ailleurs… Je pourrais mettre beaucoup de temps à citer tous les exemples de mépris des femmes. J’ai de la chance d’être née ici et maintenant. Je fais partie des femmes les plus libres du monde car j’ai presque les mêmes droits que les hommes. Presque. Mais voilà, pour moi le « presque » est en trop. Parce que c’est pire ailleurs, on me demande de me contenter de mon sort de femme d’ici ?
Ici, les hommes ne partagent pas les tâches ménagères.
Ici, les hommes gagnent en moyenne 10 ans de salaire en plus.
Ici, la candidature d’une femme éligible à la présidence n’est pas respectée.
Ici, les hommes peuvent louer un corps et en faire tout ce qu’ils veulent sans se préoccuper de ce qui a amener cette personne à se prostituer.
Ici, des fillettes d’origine africaine sont quand même excisées.
Ici, des jeunes femmes sont envoyées dans le pays d’origine de leurs parents pour y être mariées de force.
Ici, tous les 3 jours, une femme meurt sous les coups de son compagnon.
Ici, une victime de viol est soupçonnée d’avoir provoqué le criminel.
Ici, des commandos anti-IVG militent contre le choix des femmes.
Ici, on estime que la parité est atteinte avec 7 femmes et 15 hommes au gouvernement.
Ici, les publicitaires manquants d’imagination déshabillent les femmes dans leurs publicités.
Ici, on préfère mépriser et déplacer les prostituées, plutôt que se battre pour un monde sans marchandisation du sexe.
Ici, on débat sur le voile et la laïcité mais pas sur l’oppression des femmes musulmanes.
Ici, les hommes et les femmes qui militent contre toutes ces discriminations et bien d’autres, sont vus comme extrémistes, ridicules et menant un combat d’arrière garde.
Mais ceci ne suffit pas à me faire reculer devant mes idéaux. Je pense sincèrement que l’égalité des sexes ne pourra progresser que si nous somme solidaires les unes des autres, et les hommes avec nous. Cela s’appelle la sororité. Cette notion doit dépasser les frontières, pour nos sœurs afghanes, algériennes, et toutes les autres femmes opprimées dans le monde… C’est notre devoir de privilégiées.